Aujourd’hui, accompagné de Giovana mais aussi de la pluie et de la neige depuis un petit bout de temps, nous prenons la direction des alpages de Bouchet situés sous la Roche Pastire. Il est pile midi quand nous arrivons au dernier chalet qui marque la fin de l’ascension. Pendant que Giovana mange son sandwich, j’en profite pour creuser un trou. Curieux de savoir ce qui se passe sous nos skis avec cette limite pluie/neige qui ne cesse de faire le yoyo. Le dernier chalet de Bouchet dans le Beaufortain est à 1770 mètres d’altitude. Je creuse côté Sud Ouest. Il neige.
Mille feuille
L’épaisseur du manteaux neigeux est d’environ 1.30 mètres. J’identifie à cet endroit pas moins de 16 couches!
1: Neiges fraîches et particules reconnaissables sur 30 cm environ, c’est la neige qui tombe à ce moment.
2: Grains fins, la neige tombée hier a déjà subi une métamorphose à faible gradient de température.
3: 3 petites couches de grains fins de moins d’un centimètre chacune avec la présence de grains de sable sur celle du dessous et du dessus. Le vent provenant du Sud à ramené des grains de sable.
4: Grains fins.
5: Grains fins et grains ronds avec des grains de sable provenant du vent de Sud mélangé à la pluie .
6: Grains ronds.
7: Grains fins.
8: Grains ronds.
9: Croûte de regel. Probablement due à une nuit plutôt dégagée.
10: Grains Ronds.
11: Grains fins.
12: Grains ronds.
13: Grains fins.
14: Grains ronds sur environ 30 cm.
L’alternance de couche de grains fins et de grains ronds est la résultante d’une limite pluie/neige qui ne cesse de faire le yoyo. Il a plu jusqu’à 2000 mètres d’altitude. Les températures plutôt chaudes favorisent les métamorphoses à faible gradient de température d’où la présence de couches de grains fins. Pour finir, le vent du Sud à ramené des grains de sable qui pourraient constituer une couche fragile permanente. Les températures de l’air ne sont pas assez froides pour qu’une métamorphose à moyen et fort gradient s’effectue et ainsi constituer des couches fragiles permanentes.
En revanche, cette pluie a franchement humidifié le manteau neigeux en profondeur (la Teneur en Eau Liquide et la masse volumique augmentent) favorisant le risque de déclenchement d’avalanche de fond.
J’en profite également pour faire un test de stabilité de compression à la pelle (tap test). Premier effondrement au 5ème coup avec le coude au niveau de la couche 1. Ce sont les couches fragiles temporaires constituées de neiges fraîches et particules reconnaissables (plaque friable de surface).
Second effondrement au 6ème coup avec l’épaule au niveau de la couche 5. Couche constituée de grains ronds et fins avec grains de sable.
Aucun départ, seulement des effondrements. Aujourd’hui, le bulletin d’estimation du risque d’avalanche indique un risque 2 au dessous de 2200 mètres d’altitude et un risque 3 au dessus de cette même altitude. Le soleil prévu demain va provoquer l’humidification de la surface du manteau neigeux, le risque d’avalanche devrait augmenter en dessous de 2200 mètres.
Be safe